Approche socio-culturelle du soin
A Mayotte le contexte socioculturel est particulier. En tant que soignant il faut apprendre à s'adapter à une culture différente qu'en métropole avec ses spécificités dans les rites, croyances, tabous... Je vous fait part de points essentiels appris au contact des personnes et lors de l'accueil à l'hôpital.
La santé : La définition par l'OMS de la santé diverge de la signification que pourrait en donner le mahorais, il se trouve en bonne santé dès qu'il peut vivre le quotidien. S'il est touché par un déséquilibre psychique ou physiologique sans importantes conséquences sur le quotidien il ne voit pas l'intérêt de consulter un médecin et de se soigner. Cela est important à prendre en compte pour l'adhésion aux soins, les éducations thérapeutiques, les maladies chroniques, les actions de santé...
La maladie : La religion à Mayotte est très présente avec l'Islam, c'est un islam tolérant avec 5 prières par jour. La maladie est une fatalité acceptée en tant que volonté d'Allah. Il y a aussi l'animisme, la maladie peut être le fait des Djins (mauvais esprits). L'acharnement contre la maladie est très mal vu. Lorsqu'une femme est enceinte, elle est considérée comme malade et on prends soin d'elle en tant que tel. On lui fait à manger, on réponds à toutes ses demandes et désirs.
Les Djins : Les Djins sont des esprits de personnes décédées dans la famille qui reviennent soit apporter une aide soit au contraire apporter le mauvais oeil. Ils viennent que dans des endroits sains, normalement ils ne se manifestent pas à l'hôpital qui est considéré comme un endroit sale. La psychiatrie accueillent des personnes atteintes de crises de Djins, la prise en charge est difficile à appréhender car nous connaissons peu l'approche culturelle de la croyance des Djins. A l'arrivée d'une personne en crise, nous pourrons penser à une schizophrénie... Parfois il suffit de répondre à la demande du Djins : « je m'en irai si j'ai un bain de mer »... Le fait de l'enmener se baigner en mer pourra faire partir le Djin. Un djin peut venir posséder une personne si elle a fait quelque chose de mal, c'est pour la protéger. Les Fundis (guérisseurs) peuvent intervenir pour « exorciser » la personne. Ce sont eux qui maitrisent la médecine traditionnelle, très présente à Mayotte où parfois elle domine la médecine moderne. Généralement les deux fonctionnent ensemble, le médecin acceptant une part de médecine traditionnelle dans les soins (comme des massages à la noix de muscade écrasée sur la pierre de santal pour les crises de Djin, les paralysies...) Un djin s'il n'est pas accueilli comme il se doit (cérémonie d'accueil) pourra montrer son mécontentement.
En pédiatrie par exemple il faut éviter de dire au bébé qu'il est beau car on risque d'attirer le mauvais oeil sur lui, ou insister sur le fait qu'il soit en bonne santé car cela risque aussi d'attirer des problèmes de santé. En rentrant dans une chambre il faut saluer les parents en premier et leur parler beaucoup, éviter de concentrer l'attention que sur l'enfant mais aussi les parents.
La mort : C'est une partie de la vie et acceptée comme tel. La mort n'est pas tabou, elle est programmée. Personne ne peut savoir la date de sa mort, il ne faut donc pas rassurer la famille en lui faisant comprendre qu'il ne va pas mourir car seul Allah le sait. Lorsqu'un enfant décède, la maman peut sembler insensible car elle ne pleure pas. En fait c'est qu'il faut éviter de pleurer lors d'un décès car nos pleurs font mal au défunt. Lorsqu'un enfant part, il se transforme en ange et est parmi nous, il voit tout et entend tout. Il est donc égoiste de pleurer, si le bébé voit sa mère pleurer il aura de la peine. L'accompagnement de la personne qui décède par la famille est très important, il faut laisser la famille fermer les yeux du défunt pour que la fille, la mère... dise en revoir au défunt et lui demande pardon pour ses torts, ainsi le défunt part sereinement et la famille peut entreprendre son deuil. Une famille qui ne peut pas dire au revoir à son défunt ne pourra peux-être jamais faire son deuil. En réanimation, si un patient décède et que la famille n'est pas arrivée, il faut attendre qu'elle arrive car c'est elle qui débranchera les appareils, fermera les yeux et fera la prière. La prière est essentielle pour le malade qui décède. La toilette mortuaire ne se fait pas, c'est à la famille de le faire selon des rites bien particulier (elle est faite par une personne du même sexe que le mort, habilitée à l'effectuer, la toilette doit se faire au dessus de la terre car l'eau doit être rendu à la terre, dans les maisons il y a généralement un endroit aménagé). Dans le service il faut simplement nettoyer les souillures les plus visibles (sang sur le visage par exemple...), enlever le matériel médical (perfusion...) et maintenir la mâchoire fermée si nécessaire pendant les deux heures où le mort reste dans le service. Le mort est rendu dans les vêtements qu'il portait au moment du décès. Le rite funéraire est fait sur un corps souple donc il faut éviter la mise à la morgue qui rigidifie le corps du défunt.
Le soin : Le mahorais a confiance dans le soignant. Si une explication est donnée et qu'il ne pose pas de questions c'est pour être respectueux, il n'aura pas forcément compris. S'il pose une question c'est comme un manque de confiance dans ce que dit le soignant. Il faut donc faire reformuler les explixations pour être sûr de la compréhension. Cependant, il est de plus en plus demandeur d'informations. L'accueil, la communication et la relation sont très importantes. En shimaoré le « vous » n'existe pas mais quand on parle en français il faut vouvoyer les personnes car le mahorais sait qu'en français le vous est une marque de respect lorque l'on parle à une personne inconnue.
Les tabous : les excréments, l'acte sexuel, l'anatomie pelvienne. Les femmes enceintes bénéficient d'une trêve sociale concernant les tabous.
Les interprètes : Faire attention d'être bien compris par l'interprète. Si on parle shimaoré faire attention car l'accent peut facilement déformer le sens des paroles.
Le respect : ne jamais préjuger avant de l'avoir demandé que la personne ne parle ou ne comprends pas le français. Les malades comprennent beaucoup plus le français qu'ils ne le parlent donc attention à ce que l'on dit en toutes circonstances.
jeudi 15 juillet 2010
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